Dans l’affaire dite du « riz de la Covid », tous les acteurs de l’agroalimentaire se posent une question centrale : Pourquoi la Cour des Comptes s’est entêtée à baser son audit sur l’arrêté de 2013 fixant le prix du riz brisé ordinaire pour incriminer l’achat du Gouvernement du Sénégal en 2020, 7 ans après.
En effet, la loi 94-63 du 22 Août 1994 sur les prix, la concurrence et le contentieux économique pose un principe en son article 2 : « les prix des biens, produits et services sont déterminés par le libre jeu de la concurrence ».


Les articles 42 et 43 de la même loi exposent les exceptions à ce principe et les modalités de mise en œuvre des dites exceptions :
Art 42: « Lorsque les circonstances l’exigent pour des raisons économiques et sociales, certains biens, produits et services peuvent faire l’objet d’une fixation des prix par voie législative ou réglementaire. »

Art 43: « Nonobstant les dispositions de l’article 42 de la présente loi, des mesures temporaires contre les hausses excessives des prix, motivées par une situation de calamité ou de crise, par des circonstances exceptionnelles ou par une situation de marché manifestement anormale dans un secteur déterminé, peuvent être prises par arrêté du ministre chargé du commerce et dont la durée d’application ne peut excéder 2 mois renouvelable une fois. »
En d’autres termes, la loi indique que les prix sont fixés librement par le jeu de la concurrence sauf en cas de circonstances exceptionnelles relatives à des hausses excessives dues à une situation de monopole, de crise économique, sociale ou sanitaire.
Lorsque qu’on est en présence de ces circonstances, le ministre en Charge du commerce est autorisé à prendre un arrêté pour fixer les prix pour une durée de 2 mois, renouvelable une seule fois.
En français simple, le législateur a indiqué dans ce texte de 1994 que la fixation du prix du riz décidé en 2013 ne peut être valide qu’au maximum 4 mois après sa signature.
Malgré cette clarté du texte, les magistrats de la cour des comptes ont utilisé un arrêté caduque depuis 7 ans pour incriminer une opération d’achat de denrées alimentaires issue d’un appel à concurrence transparent suivant les recommandations de l’ARMP sur ma demande, malgré la dérogation au code des marchés publics dont mes services bénéficiaient.
Au-delà de cette incongruité juridique, largement relevée par les praticiens du droit économique, les fournisseurs engagés dans l’opération attestent que les prix appliqués — notamment les 275.000 francs CFA la tonne pour le riz brisé ordinaire — étaient ceux en vigueur sur le marché sénégalais en avril 2020.
Le prix à la tonne appliqué avait été suggérés par la Direction du Commerce Intérieur, structure compétente relevant du Ministère du Commerce sollicité, par M. SOW DAGE du Ministère du Développement communautaire qui avait recueilli leurs avis .
Cette démarche rigoureuse vient appuyer, s’il en était besoin, le fait que les prix retenus n’étaient en rien fantaisistes mais bel et bien alignés sur la réalité économique de l’époque.
Mieux encore les vérificateurs avaient appliqué l’arrêté 2013 sur le riz et sur le sucre c’est après avoir reçu la réponse de M. ALIOU SOW qu’ils ont retiré le sucre pour soulever des irrégularités sur le riz.
Aliou Sow fait remarquer que «dans le rapport final de la Cour des comptes, l’observation concernant le sucre cristallisé a disparu alors que l’arrêté de 2013 concerne à la fois le riz brisé non parfumé et le sucre cristallisé. Ce qui… me fonde dans l’intime conviction que le maintien de l’observation sur le riz relève manifestement d’une erreur des auditeurs… Ils ne peuvent introduire la notion de surfacturation, dès lors qu’un appel à concurrence a été organisé et, mieux, les offres retenues sont conformes au tableau des prix du ministère du Commerce».
Pourquoi n-a t-on pas demandé aux importateurs de communiquer toutes leurs factures de la période de mise en œuvre des dites opérations ( avril 2020) aux fins de comparaison ?
Dès lors, une question s’impose : qu’est-ce qui explique une telle insistance à mettre en cause M. Aliou Sow, ancien DAGE du Ministère du Développement communautaire, dont l’action dans ce dossier a été saluée pour sa diligence, sa transparence et son respect scrupuleux des recommandations de l’ARMP, malgré un contexte d’urgence nationale ?
Peut-être faut-il regarder au-delà des seuls éléments techniques de l’audit et interroger les dynamiques humaines, les parcours croisés, les antagonismes anciens ou les ressentiments latents qui peuvent parfois altérer la neutralité attendue dans l’examen d’un dossier. L’histoire institutionnelle et les rapports entre certains anciens collègues au Ministère des Finances aujourd’hui investis d’un pouvoir de contrôle ( particulièrement l’un des membres de la mission de vérification) mériteraient d’être relus à l’aune de cette affaire.
















