L’Assemblée nationale vient de procéder à une série de modifications de son règlement intérieur. Certaines avancées méritent d’être saluées, notamment :
• Le renforcement des pouvoirs de la commission d’enquête parlementaire
• L’instauration d’un comité permanent d’évaluation des politiques publiques ;
• La création d’une chaîne parlementaire ;
• La définition claire de la procédure en cas de vacance du poste de président ;
• L’augmentation du nombre de membres des commissions (35 membres désormais) ;
• La clarification du régime d’incompatibilités des députés suppléants siégeant en remplacement de ministres ;
• Et l’engagement à respecter un calendrier de deux séances de questions par mois au gouvernement.
Autre avancée majeure : la dématérialisation des documents budgétaires, avec la mise à disposition des Lois de Finances Initiales (LFI) et Rectificatives (LFR) en version électronique. Une réforme qui facilitera le travail des parlementaires tout en réduisant les coûts liés aux impressions papier.
Des réformes techniques, mais pas structurelles Cependant, ces réformes ne touchent ni à l’architecture de l’Assemblée, ni à son efficacité. À l’heure où les Sénégalais exigent davantage de rigueur dans la gestion des ressources publiques, ces lacunes sont regrettables. Aucune disposition n’a été prise pour alléger la structure du Bureau, pourtant pléthorique avec 8 vice-présidents et 6 secrétaires élus. Une réduction à 4 viceprésidents et 4 secrétaires élus aurait permis un geste fort de sobriété républicaine. Cette seule réforme aurait permis une économie de plus de 1,3 milliard de FCFA sur une législature. Une somme qui aurait pu financer :
• La construction d’environ 160 salles de classe en dur (en remplacement d’abris provisoires à 8 millions l’unité) ;
• Ou encore 60 postes de santé communautaires, à raison de 20 millions FCFA l’unité.
Une Assemblée utile plus qu’une Assemblée d’apparat L’élargissement des commissions est une réponse quantitative. Mais l’impact aurait été plus important avec la mise en place de sous-commissions permanentes thématiques : éducation, santé, environnement, jeunesse, etc.
Une telle organisation favoriserait une meilleure évaluation des politiques publiques et un suivi rigoureux des budgets sectoriels. Il est également urgent de moderniser la gouvernance parlementaire. Les députés détiennent un pouvoir budgétaire important : ils doivent l’exercer pleinement pour demander des comptes aux directions et agences publiques, sans compromission ni interférence.
Cela suppose une Assemblée outillée, structurée, ambitieuse. Ce que ne garantit pas encore ce nouveau règlement. Autre sujet tabou : l’imposition des indemnités parlementaires. L’Assemblée aurait pu initier une réforme fiscale interne, conformément aux engagements du Premier Ministre Ousmane Sonko lorsqu’il était dans l’opposition, dénonçant à juste titre la faible contribution fiscale des élus. Réformer pour retrouver la confiance
Dans un pays où la jeunesse est confrontée au chômage, où les campagnes manquent de soins, et où des milliers d’élèves étudient encore sous des abris en zinc, chaque franc public compte. L’Assemblée nationale devrait être la première à en donner l’exemple.
L’achat récent de 165 véhicules à 50 millions l’unité, largement critiqué, a révélé un fossé entre l’institution et les préoccupations réelles des citoyens. Ce genre de dépenses ne passe plus dans une République qui se veut sobre, éthique et solidaire. Doter les députés de véhicules est une obligation légitime mais à des prix plus abordables pour que nos deniers publics soient préservés.
L’Assemblée ne peut plus être un simple théâtre politique. Elle doit redevenir un levier central de la transformation démocratique, économique et sociale du Sénégal. C’est à ce prix qu’elle regagnera la confiance des citoyens et contribuera efficacement à l’avènement d’une République au service du peuple, de la souveraineté nationale et du progrès partagé.
Il est encore temps et nous pensons que la volonté y est.