Les avocats de la partie civile dans l’affaire Astou Sokhna, du nom de cette dame décédée en couche le 1er avril dernier à Louga, vont déposer, dans les prochaines heures, une plainte contre la gynécologue de la maternité et l’ex-directeur de l’hôpital Amadou-Sakhir-Mbaye, a annoncé l’un d’eux, Me Ousseynou Gaye, mercredi.
Cette plainte sera adressée au juge d’instruction du Tribunal de grande instance de Louga, avec l’objectif de faire juger les deux personnes visées pour non-assistance à personne en danger et homicide.
« Nous allons saisir, dès demain, le juge d’instruction, parce que nous voulons être logiques avec nous-mêmes. Nous allons déposer une plainte contre la gynécologue et le directeur de l’hôpital pour non-assistance à personne en danger et homicide. Nous estimons que ce dossier ne devait pas aller en flagrant délit. Nous voulons qu’un juge investigue dans cette affaire », a-t-il dit.
Il s’adressait à la presse au sortir d’une audience sur l’affaire Astou Sokhna, renvoyée par le juge au 5 mai prochain à la demande de la partie civile.
A ses yeux, « régler une affaire pareille en flagrant délit pose problème. C’est un dossier d’information qui devait être ouvert », dit-il en notant que le procureur a requis le délit de non-assistance à personne en danger.
« Si la conséquence de cette charge est la mort, il faut régler le problème de la mort », a-t-il indiqué, avant d’ajouter : « Une gynécologue qui se permet, depuis chez elle, de faire établir un certificat de mort, c’est un problème. Ils n’ont pas respecté le protocole sanitaire. Cette légèreté est coupable et ne doit pas être laissée ».
Le Tribunal de grande instance de Louga (Nord) a renvoyé au 5 mai prochain le procès des six sages-femmes poursuivies pour non-assistance à personne en danger après le décès, le 1er avril, d’une femme en couches à la maternité du centre hospitalier régional.
Le Tribunal des flagrants délits a donné une suite favorable à une requête introduite par la partie civile qui dit n’avoir pas eu accès au dossier.
Le juge a, dans la foulée, rejeté la demande de liberté provisoire introduite par les avocats de la défense.
Quatre sages-femmes ont été placées sous mandat de dépôt depuis le 19 avril.Elles resteront en prison. Les deux autres avaient été inculpées et remises en liberté.
Les avocats de la défense ont exprimé leur désaccord quant au maintien en détention des quatre sages-femmes, estimant que l’argument invoqué par le parquet pour s’opposer à leur remise en liberté leur était inapplicable.
Pour assister au procès, de nombreuses personnes s’étaient rendues tôt ce matin au tribunal de Louga dont elles ont envahi l’enceinte et les alentours de l’enceinte. Parmi elles, figurent de nombreux agents de santé, venus apporter leur soutien aux sages-femmes poursuivies.
Sur place, un impressionnant dispositif sécuritaire avait été déployé par la Police pour veiller au grain et filtrer les entrées.
Seuls les témoins, les proches des parties prenantes et les journalistes avaient été autorisés à accéder à la salle d’audience.
Cette affaire judiciaire est née du décès en couches, le 1er avril dernier, d’Astou Sokhna à la maternité de l’hôpital Amadou-Sakhir-Mbaye.
Ses proches pointent du doigt une négligence du personnel hospitalier. La patiente ayant attendu en vain plusieurs heures pour subir une césarienne.
En réaction, son époux a déposé une plainte devant le procureur de Louga pour non-assistance à personne en danger.
L’enquête menée par la police a débouché sur l’inculpation de six sages-femmes et le placement sous mandat de dépôt de quatre d’entre elles, plus de deux semaines après le décès d’Astou Sokhna.
Les circonstances de la mort de cette femme d’une trentaine d’années avaient suscité une vague d’indignation et une grande émotion dans l’opinion publique.
Le ministère de la Santé avait dépêché à Louga une mission d’enquête administrative, dont le travail a débouché sur la prise de mesures conservatoires à l’encontre de certains agents de cette structure hospitalière du nord du pays.
Dès le 13 avril, le directeur du centre hospitalier, Amadou Guèye Diouf, a été limogé en Conseil des ministres et remplacé par Abdallah Guèye, un administrateur hospitalier.
Dans la foulée, l’intersyndicale des travailleurs de l’hôpital avait organisé un sit-in pour dénoncer l’empressement avec lequel la tutelle s’y est prise pour sanctionner une partie du personnel médical.
Ils ont, par la suite, reçu le soutien de nombreux agents de santé à travers une grève ayant paralysé pendant 72 heures une grande partie du système sanitaire du pays.