Alors qu’un vaccin contre le Covid-19 est en train d’être déployé partout dans le monde pour tenter d’éradiquer le virus, une nouvelle souche présentant une mutation a été détectée ces derniers jours au Royaume-Uni. Sur sa page Facebook, le généticien français Axel Kahn a rappelé que, à ce jour, « trois cent mille mutants de CoV-2 ont été séquencés dans le monde ». La nouvelle souche porte notamment une mutation, nommée N501Y, dans la protéine du spicule du coronavirus (la pointe qui se trouve à sa surface et lui permet de s’attacher aux cellules humaines pour les pénétrer). D’autres pays ont-ils été touchés par cette nouvelle souche ?
Le Royaume-Uni a informé l’Organisation mondiale de la santé (OMS) de la propagation « jusqu’à 70 % » plus rapide de la nouvelle souche, selon le premier ministre, Boris Johnson.
Cette information a notamment conduit de nombreux pays européens, tels que la France, l’Autriche, la Belgique, l’Allemagne, l’Irlande, l’Italie ou encore les Pays-Bas, à suspendre les vols en provenance du territoire britannique dimanche.
L’apparition de cette nouvelle souche du coronavirus SARS-CoV-2, vraisemblablement beaucoup plus contagieuse que les autres, inquiète les épidémiologistes. Le ministre de la santé britannique, Matt Hancock, a estimé dimanche 20 décembre que cette variante était « hors de contrôle », justifiant ainsi le reconfinement de Londres et d’une partie de l’Angleterre, reconfinement qui pourrait selon lui durer jusqu’à la mise en place généralisée de la campagne de vaccination.
« Nous devions reprendre le contrôle, et la seule manière de le faire est de restreindre les contacts sociaux », a déclaré Matt Hancock sur Sky News. « Ce sera très difficile de garder [cette souche] sous contrôle jusqu’à ce qu’un vaccin soit déployé », a-t-il ajouté. La nouvelle souche du virus serait apparue mi-septembre, soit à Londres, soit dans le Kent (sud-est), selon lui.
L’information « concernant cette nouvelle souche est très préoccupante », renchérit le professeur Peter Openshaw, immunologiste à l’Imperial College de Londres et cité sur le site du Science Media Centre, notamment parce qu’« elle semble de 40 % à 70 % plus [fortement] transmissible ». « C’est une très mauvaise nouvelle », ajoute le professeur John Edmunds, de la London School of Hygiene & Tropical Medicine, car « il semble que ce virus [soit] largement plus infectieux que la souche précédente ».
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), il n’y a en revanche « aucune preuve d’un [quelconque] changement dans la gravité de la maladie », même si ce point fait actuellement l’objet de recherches. « Rien n’indique pour le moment que cette nouvelle souche cause un taux de mortalité plus élevé ni qu’elle affecte les vaccins et les traitements. Toutefois, des travaux urgents sont en cours pour confirmer cela », ajoute Chris Whitty.
La variante pourrait en revanche « affecter l’efficacité de certaines méthodes de diagnostic », selon « des informations préliminaires » fournies par l’OMS, lesquelles seront complétées et précisées dès que l’organisation aura « une vision plus claire des caractéristiques de cette variante », a indiqué une de ses porte-parole dans un courriel adressé à l’Agence France-Presse.
D’autres pays ont-ils été touchés par cette nouvelle souche ?
Selon le docteur Julian Tang, de l’université de Leicester, « cette mutation N501Y circulait déjà sporadiquement bien plus tôt cette année et en dehors du Royaume-Uni : en Australie en juin-juillet, aux Etats-Unis en juillet et au Brésil en avril ».
Parallèlement aux trois pays qui ont attesté la présence sur leur sol de la souche britannique, d’autres Etats ont eux aussi signalé à l’OMS l’existence de nouvelles variantes, porteuses de certaines mutations génétiques communes à celles de la variété britannique – la mutation dite « N501Y », notamment. L’Afrique du Sud, qui dès vendredi 18 décembre avait fait état d’une variante problématique, considère que cette mutation N501Y est à l’origine d’un plus grand nombre de contagions.
Interrogée dimanche par la BBC, la spécialiste en maladies infectieuses de l’OMS, Maria Van Kerkhove, a indiqué que ces dernières heures, quelques cas de cette nouvelle souche ont aussi été détectés au Danemark, au nombre de neuf, ainsi qu’un cas aux Pays-Bas et deux en Australie.
Concernant la France, aucun cas comprenant cette mutation n’a pour le moment été détecté. Pour autant, le ministre de la Santé Olivier Véran a indiqué ce lundi matin sur Europe 1 qu’il était « tout à fait possible » que le virus mutant « circule en France » : « Sur les derniers jours, 500 souches virales ont été identifiées et analysées en génétique, ce variant n’a pas été retrouvé. (…) Ce qui ne veut pas dire qu’il ne circule pas. »
En Conseil des ministres ce lundi matin, le président de la République Emmanuel Macron, touché par le Covid-19, s’est inquiété de cette « mutation problématique du virus avec une forme beaucoup plus agressive ». Lors de ce point sur le virus, le chef de l’État a notamment indiqué qu’il fallait « redoubler de vigilance ». « Nous sommes en train de construire la réponse la plus adaptée », a-t-il assuré.
Au Sénégal, l’apparition d’une nouvelle souche de Covid-19 a été soulevée, lors de la réunion de crise tenue dans les locaux du ministère de la Santé et de l’Action sociale. Répondant aux interpellations, Abdoulaye Diouf Sarr a rassuré en déclarant: «Nous analysons au plan scientifique tout ce qui se passe autour de ce virus. Et si une situation mérite que le Sénégal prenne une décision, nous allons la prendre pour l’intérêt de nos populations. Je peux vous garantir que tous les moyens seront toujours disponibles en toute circonstance».