Intérimaire à partir de mars 2017, suite au départ de Khalifa Sall, puis maire élue,
Soham El Wardini devient officiellement maire de Dakar désignée au premier
tour du scrutin à la suite d’élection en septembre 2018. Depuis, la dame a tenu
d’une main de fer l’héritage, le programme et la vision de son prédécesseur,
mieux, elle les a valorisés. Sa loyauté étant clairement déclinée, identifiée et bien
déterminée, Mme Wardini n’y est pas allée sans décliner très clairement sa propre
vision pour Dakar qui n’est rien d’autre que de faire de la capitale une métropole
propre et écologique car ne voulant plus “ que Dakar soit citée parmi les villes
les plus sales du monde. “ Compétente et discrète, la dame avance sans sourciller
et donne à la capitale toute la concentration qu’elle mérite. Hélas, un élément
perturbateur est venu changer la donne, il s’agit de la COVID 19. Les priorités
telles que définies avant la pandémie deviennent caduques et obsolètes, il fallait
donc se réadapter et se réinventer face à la nouvelle normalité. Ce qu’elle a fait
avec brio, sans tambour ni trompette, loin de toute forme de folklore, Madame
Wardini a été la maire qu’il fallait à Dakar dans ces moments de tension car
incarnant le juste milieu, le “centre”. Sa posture de femme, parfois même de
maman, patiente et éduquée, pouvant dialoguer sincèrement avec le pouvoir tout
en actant son ancrage dans l’opposition a fini de révéler son leadership de manière
incontestable. Cette posture est d’ailleurs celle que devrait avoir tout maire de
Dakar conscient et soucieux des missions énormes que les populations lui
confient et du fait que Dakar soit partie intégrante de l’État central, la
gouvernance locale abritée par l’hôtel de ville sis à 500 m du palais est obligée de
dialoguer voire de négocier avec le pouvoir central pour répondre aux vraies
attentes “des peuples” de la capitale. Tout ce travail devrait être fait dans un délai
court car Madame Wardini qui doit accueillir le 9eme forum mondial de l’eau a
hérité de la mairie à mis mandat. Il est donc arrivé le moment de rendre compte
et de présenter le bilan du travail qui lui a été confié pendant 3 ans. Dakar devrait
écouter son maire, évaluer son bilan et choisir de la reconduire ou pas. C’est cela
la bonne démarche, mais en l’écartant du scrutin, on refuse au Dakarois l’occasion
historique d’évaluer leur maire et les 5 ans de mandature (2 +3). C’est une
forfaiture, pire, une injustice. Taxawu Ndakaaru et la coalition Yewwi Askan Wi
ont très mal joué, elles ont manqué de courage, elles ont été injustes. La
candidature de Soham El wadini ne devrait souffrir d’aucun problème, mieux,
elle représente la normalité, toute autre candidature validée par Taxawu ndakaru
devient une incongruité. Ainsi, nous trouvons judicieux de nous interroger sur la
pertinence d’éliminer cette dame de la course, d’empêcher le maire sortant de
participer aux débats et de défendre son bilan. En l’écartant de la coalition, on
piétine l’émancipation des femmes qui est le résultat de longues années de lutte.
En la minorisant, on foule au pied tous les acquis démocratiques que nous avons
sur l’égalité des chances. En l’empêchant d’être candidate, on exclut la seule
femme prête à demander la voix des Dakarois et capable de remporter le scrutin.
On empêche donc toute une population à avoir une variété de choix mais pire
encore on creuse davantage la sous-représentation des femmes dans les sphères
de décision.
Le sort de Madame El Wardini rappelle l’histoire de Yuriko Koiké qui a
récemment entamé son deuxième mandat de maire (gouverneure) de Tokyo. De
la même façon, que Madame Wardini a été bloquée par sa propre coalition,
Madame Yuriko Koiké a elle aussi été bloquée par son parti, le PLD qui a refusé
de la soutenir à briguer la mairie de Tokyo (la ville la plus riche du monde dont
la taille de l’économie est équivalente à celle de toute l’indonésie). Mme Koiké
qui était tour à tour ministre de l’environnement et de la défense du Japon a quand
même relevé le défi, elle est partie à l’élection et les a battus à plate couture. Elle
en est aujourd’hui à son deuxième mandat et a même créé son propre parti.
A Mme Wardini de relever le même défi et de remporter comme Mme Koiké le
scrutin du 23 janvier 2022. Elle en a le talent, la capacité et les moyens car elle
présente un profil singulier, bien différent de celui de la classe politique
sénégalaise classique. Son discours est neuf, sa posture contraste fort bien d’avec
ce à quoi nous sommes habitués, elle rappelle nos valeurs les plus chantées de
notre histoire : le dialogue, l’écoute et la discrétion.
Car il est clair qu’aujourd’hui les électeurs ne font pas confiance aux partis
classiques, entachés de scandales de corruption à répétition depuis des années.
Comme Fatima Zahra Mansouri (Marrakech), Joanne Anderson (Liverpool),
Anne Hidalgo (Paris), Lori Lightfoot (Chicago), ou encore Yuriko Koike
(Tokyo), Madame El Wardini peut donc foncer et remporter le scrutin, elle peut
bel et bien gagner cette élection face au pouvoir et face à sa propre coalition qui
refuse de la soutenir si elle y croit. Elle a le meilleur profil, détient le crédit du
“maire sortant”, celui du “discours neuf” et elle incarne carrément le “centre” vu
le niveau de violence aussi bien physique que verbale dont nous faisons déjà face.
Allez! toutes et tous debout pour une victoire éclatante de Mme Soham El
Wardini au soir du 23 janvier à la Mairie de Dakar.
Dr Papa Elimane FAYE
Enseignant-chercheur
Université Iba Der Thiam