Dans le paysage politique sénégalais, Ousmane Sonko s’affiche comme une figure controversée.
En effet, sa trajectoire politique, marquée par la violence verbale et physique ainsi que son mépris des institutions qui
ont fait de lui un iconoclaste, vont à l’encontre de l’évolution démocratique du pays. Le populisme et la manipulation des masses ont réussi à le hisser au sommet, mais ne l’y maintiendront pas.
Certes au Sénégal, le peuple a su cultiver un sens critique fort, fruit d’une histoire riche en luttes pour la liberté et les droits civiques. Mais l’impact des agissements de Sonko sur cette dynamique, reste une plaie béante qu’il faut vite refermer.
D’abord, il est essentiel de reconnaître que les Sénégalais, au fil des décennies, ont traversé des périodes de répression. Ce passé douloureux a forgé une conscience politique aiguisée qui valorise l’estime de soi, le dialogue et la paix. En ce sens, le martyre, symbole de souffrances et de sacrifices, n’est pas un idéal que le Sénégalais recherche. Au contraire, l’aspiration collective se concentre sur la préservation des acquis démocratiques et le sens de l’altérité, fruits d’efforts acharnés.
La démocratie sénégalaise – passez moi l’expression – relevée par des luttes rituelles contre les régimes autoritaires, nécessite une posture humble, une gouvernance respectueuse des institutions et des droits des individus.
Sonko semble ignorer cette réalité, préférant recourir à des discours qui provoquent et divisent. Chacune de ses interventions, souvent teintées de colère, de mépris et d’attaques ad personam, ne fait qu’attiser les tensions au lieu de favoriser un dialogue constructif de notre vivre ensemble. Naguère levées de bouclier contre la Presse, l’Eglise et les Chefs religieux, aujourd’hui c’est le temps des exactions contre la citoyenneté et l’engagement politique.
En ciblant personnellement le Président Macky Sall, ainsi que les magistrats et les forces de sécurité, Sonko a passé des années à porter des coups de haches à l’édifice que des générations ont construit avec moult sacrifices. Il se trompe en misant sur le soutien que la plèbe semble lui accorder. Le réveil risque d’être brutal.
Et nul n’a intérêt que ce pays replonge dans les travers causés par les déclarations et agissements de Ousmane Sonko qui, fort du soutien irréfléchi d’une jeunesse au cœur des méfaits d’un dérèglement des rapports mondiaux, a fait feu de tout bois afin d’arriver à ses fins. Le bilan humain, matériel, financier et social est énorme. C’est en assumant sa lourde responsabilité dans situation et en indiquant les voies et moyens de résorber ces gaps qu’il peut rassurer ce petit peuple qui l’a porté en triomphe. La “Solution” n’est pas ailleurs.
Les Sénégalais préfèrent un débat d’idées, une confrontation de programmes et non un fascisme d’une époque révolue. Ni Hitler, ni Mussolini, encore moins Mobutu n’ont réussi à bâillonner leur peuple.
Ousmane Sonko qui a joué à fond dans le registre de la victimisation et au martyre, martelait: “L’article 80 est une hérésie juridique qui doit disparaître de notre corpus juridique. Celui qui est allergique à la critique ne doit même pas diriger une famille ou un parti, à fortiori un État”. A l’époque, ses thuriféraires, chroniqueurs à la petite semelle et autres intellectuels organiques avaient repris à forte dose médiatique, ses prises de position circonstancielles.
Aujourd’hui, toutes ces grandes gueules se sont terrées face aux dérives de son régime. Mais c’est compréhensible; il n’est pas poli de parler lorsque la bouche est pleine.
Qu’il s’agisse de la reddition des comptes, de la lutte contre la corruption ou de l’amélioration des conditions de vie des masses populaires, la priorité aux politiques de redressement économique demeure l’essence même de la gouvernance et non le bâillonnement des libertés, la promotion de la haine et du martyre.
De plus, la tentative de réduire au silence les voix dissonantes à l’aide d’une police politique ou d’une magistrature aux ordres comme il est aisé d’en constater l’usage, ne pourra jamais travestir la volonté populaire qui vient de s’exprimer en faveur d’une horde de promus incompétents et revanchards.
Les instances judiciaires, malgré les accusations de manipulation naguère brandies par Sonko et ses acolytes, sont des pierres angulaires dans le respect de l’État de droit. Qu’elles restent ce qu’elles n’ont jamais cessé d’être: lucides, clairvoyantes et impartiales.
Le temps consacré à la mobilisation de magistrats acquis à ses envies est un temps perdu. La nécessité d’une justice impartiale est plus que jamais d’actualité, et toute manœuvre visant à la subordonner à des intérêts personnels ou politiques, met en péril les bases de notre système démocratique.
Enfin, plutôt que de se concentrer sur l’éradication de la critique et l’expression de la libre opinion, il serait salutaire pour Ousmane Sonko de se recentrer sur ses responsabilités. Le refus d’une habilitation par une Assemblée nationale légalement constituée à travers une Déclaration de politique générale et la théâtralisation à outrance de la gestion des affaires publiques sont les signes marqueurs d’un déni des institutions, de la démocratie et des fondements de la République.
Le Sénégal attend des solutions concrètes aux problèmes qui l’assaillent et qui affligent, comme la difficulté d’accès à l’éducation, la lutte contre le chômage, les bouleversements socio-économiques, le ralentissement des activités économiques et la garantie des droits de l’Homme.
En se maintenant dans un discours belliciste et en refusant de poursuivre les avancées démocratiques, à tout le moins les maintenir, il risque de s’égarer, oubliant que la véritable force politique réside dans l’adhésion populaire et non dans le culte de la tyrannie.
En définitive, le Sénégalais abhorre le martyre non pas parce qu’il ignore son passé, mais parce qu’il aspire à un futur où les luttes se mènent par des moyens pacifiques et constructifs.
Museler les voix discordantes et asseoir la terreur sont des tentatives vouées à l’échec. En attendant d’empêcher les adversaires politiques de faire campagne électorale avec la complicité de la Justice, les forces du mal s’attaquent à des citoyens dont le seul tort est de donner leur avis sur la marche actuelle du pays. Basta!
Car c’est en respectant ce pacte social de tolérance et de progrès que notre Nation consolidera son unité et continuera sa marche inexorable sur la voie de la démocratie, de la justice et du développement.
Babacar Gaye
Leader de Mankoo Mucc