Le recours à la jurisprudence ou à l’histoire est spécifiquement inscrit dans le souci d’esquisse de solution comparative devant un vide ou une incohérence des legs.
Si l‘attelage juridique s’articule autour de la loi fondamentale, des lois votées par l’assemblée nationale, il est cousu par des codes, des règlements organisant les institutions, maïs également par d’autres textes qui font force de loi. Cependant, afin que nul n’en ignore ; son élaboration repose sur une procédure claire axée sur un projet ou une proposition avant d’être votée, promulguée et publiée.
Si la ligne droite cadre étymologiquement avec le sens du droit ou de la règle, il demeure opportun, dans une organisation étatique sérieuse, une obligation d’enquêter sur les situations jugées « illégales », par rapport aux citoyens et relativement à l’exercice du pouvoir. Mais, l’imperfection liée à la nature humaine, insinue de facto, une insuffisance dans les textes, voire des fois, une aberration criarde, en déphasage net avec le bon sens, la morale ou la vie en communauté.
L’évolution du monde qui a fait naitre des concepts nouveaux, tels que la démocratie, les droits humains et d’autres, a orienté la conscience collective vers la sauvegarde de l’espèce humaine, mais aussi la puissance et la liberté d’agir, jadis exercée avec cruauté par des dignitaires depuis des lustres. La problématique liée à l’exercice du pouvoir ou de la parcelle de pouvoir, est affectée d’une part par l’imperfection humaine et d’autre part par celle des textes qui définissent nos missions et gouvernent nos actes.
L’actualité est aujourd’hui centrée sur la loi d’amnistie qui agite le landerneau politique et principalement sur cette proposition de loi introduite par un parlementaire.
Je m’interdis tout commentaire portant sur le joug politique, mais, je m’arroge le droit d’apporter mon point de vue, quand, le dessein d’une loi vise à priori, les membres d’une corporation à laquelle j’ai appartenu. Le charme de l’Armée repose sur une discipline sans faille, mais aussi des postures qu’un profane jugerait « paradoxales », « révoltantes » et en porte à faux par rapport à la nature humaine mentionnée supra.
« Les ordres sont à exécuter littéralement, sans hésitation, ni murmure, l’autorité qui les donne en est responsable et la réclamation n’est permise au subordonné que lorsqu’il a obéi ».
Cette réflexion de Napoléon Bonaparte peut être battue en brèche dans d’autres cercles intellectuels, mais parfaitement comprise par ceux à qui on a appris le « savoir-être », puis le « savoir-faire ». La prédisposition à comprendre, accepter et aimer cette assertion, a fait régner l’ordre, fait gagner des guerres et fait façonner des hommes de devoir qui agissent dans l’ombre. Pourtant au sein de cette corporation, on comprend parfaitement la nécessité de sanctionner positivement ou négativement, mais également celle de revenir sur un retour d’expériences pour capitaliser les imperfections, en vue des exercices futurs.
Alors, rapporté à la guerre ou à une situation insurrectionnelle ; l’on peut comprendre aisément l’éventualité d’un dérapage ou d’une impasse devant laquelle, le membre d’une force pourrait se retrouver.
Nos compatriotes doivent comprendre que la Police, la Gendarmerie ou l’Armée, n’entre en action que sur la base d’un ordre d’opérations, avec ses grandes lignes, la situation, la mission, les ordres particuliers ou consignes. Compte-tenu de la situation, en découlent souvent des ordres de conduite.
Ces ordres sont exécutés sur le terrain par des hommes conscients, formés au métier, imbus de responsabilités et avec en bandoulière un aveugle amour pour la patrie.
Nos compatriotes doivent aussi comprendre la nature, l’origine et le niveau d’application finale des ordres suivant le schéma hiérarchique qui s’impose. Un Président de la République ne dira jamais de tirer sur les populations. S’il demande à maintenir ou rétablir l’ordre, cela se traduira finalement sur le terrain par l’application des mesures et données techniques pour disperser les foules, ériger des barrages, contrôler de axes, boucher des itinéraires, avec l’emploi de moyens réglementaires.
Mais force est de reconnaitre que devant une foule hystérique, dotée d’armes blanches ou à feu et d’objets contondants pouvant donner la mort, les agents de la force publique retranchés, acculés et subissant des assauts, peuvent exercer la légitime défense pour se tirer d’affaire. Ce faisant, avons-nous le droit de cibler un citoyen assermenté, doté de moyens réglementaires et exerçant un service public et de tenter de lui reprocher quoi que ce soit devant des vandales qui pillaient, qui brulaient des édifices et qui exerçaient la violence sur les forces de l’ordre ? Non.
D’autres compatriotes ont pris les armes pour tirer sur l’Armée nationale. Qu’en dit-on ? Des négociations interminables, des projets de réinsertion pour certains et que sais-je ? Notre pays a perdu dans un drame maritime environ deux mille compatriotes, pourtant on continue de panser nos blessures.
Ceux qui n’ont pas fait la guerre ne pourront jamais comprendre ses aléas, l’état d’âme des soldats confrontés à toutes sortes de difficultés, au moment où celui qui est à l’origine de l’ordre est loin du théâtre des opérations. Ces hommes du devoir ne rechignent devant rien, n’ont pas de vie de famille et bravent toutes sortes de risques et d’intempéries. On leur doit reconnaissance, respect et devoir de mémoire pour les disparus. Le pays a vacillé et si aujourd’hui les institutions sont en place, on le leur doit.
Dans un ordre constitutionnel normal, les Forces de Défense et de Sécurité seront toujours assujetties à l’autorité politique, on la lui concède, mais, il ne faudrait pas que les querelles crypto- personnelles ou de chapelles conduisent vers des cibles inappropriées. Elles resteront les mêmes et assumeront les mêmes missions, quelle que soit l’identité du dépositaire légal du pouvoir. Si le Président de la République est protégé par la constitution ou susceptible d’être poursuivi que par un éventuel chef d’accusation, non clairement défini, la haute trahison, l’on peut trouver inadéquat que les acteurs subalternes puissent être placés sur l’autel du sacrifice, en obnubilant leur légitime défense.
Nos compatriotes doivent également comprendre, que les opérations sont bien élaborées par des cabinets d’Etats-majors composés d’hommes expérimentés et compétents.
Si cet élan politique n’est pas inversé, nous qui avons exercé des fonctions de guerre ne dormiraient désormais que d’un seul œil. Mieux, si on franchit ce Rubicon, l’élan du douanier qui poursuit un contrebandier, du policier devant procéder une arrestation musclée, du soldat en patrouille en zone d’insécurité ou de l’agent des parcs combattant un braconnier, pourrait manquer d’efficacité dans l’accomplissement de sa mission.
La loi 65-60 du 21 juillet 1965,portant code pénal article 92,stipule « les représentants de la Force publique appelée en vue de dissiper un attroupement ou pour assurer l’exécution de la loi, d’un jugement ou d’un mandat de justice, peuvent faire usage de la force, si des violences ou voies de fait sont exercées contre eux ou s’ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent ou les postes dont la garde leur est confiée. L’usage de moyens passifs ou moins meurtriers est recommandé par ces dispositions. Il demeure aberrant de mettre en selle des auteurs d’infractions à motivation politique devant les membres des Forces de Défense et de Sécurité qui ont une motivation professionnelle.
Si les chefs intermédiaires sont visés, ils étaient pour la plupart dans les circuits du Commandement des opérations. Si, l’objectif du procès de NUREMBERG était de marquer la fin de l’irresponsabilité pénale des Chefs d’Etat, tout comme celle des subordonnés obéissant à des ordres, l’on doit noter également que les 200 accusés du 3e Reich de 1946 ont subi la justice des occidentaux, vainqueurs. Ont-ils été irréprochables de leur cote ? L’on peut en douter.
Mes compatriotes doivent enfin comprendre, qu’on légifère pour les générations futures et que tout acte doit être posé dans ce sens. Je ne parle pas des crimes économiques ou politiques, leurs auteurs doivent être jugés et sanctionnés, au besoin. Mais initier des lois ciblant des membres des Forces de Défense et de Sécurité sera un précédent dangereux, car dans leur globalité, certains qui agissaient dans l’ombre des chefs tactiques ont encore des responsabilités. N’oublions pas également que ces différents acteurs ont été loyaux vis-à-vis de leur chef et non fidèles à eux, mais à leur devise.
Sauvons notre pays et œuvrons pour le renforcement des acquis légués par les générations devancières.
Les hommes passent et les institutions demeurent.