Le 2 août 2021, le conseil des gouverneurs du Fonds monétaire international (FMI) avait approuvé une nouvelle allocation de droits de tirage spéciaux, soit 433 milliards de DTS, l’équivalent de 650 milliards de dollars. Pour rappel, les DTS sont des actifs de réserve internationaux créés en 1969 par le FMI.
Concrètement, ils permettent de fournir indirectement des devises aux pays membres sans créer de dette supplémentaire. Sauf que les pays riches sont les premiers bénéficiaires proportionnellement à leurs quotes-parts au capital du FMI. « Bien que les pays africains soient ceux qui ont le plus besoin des DTS, ils ne bénéficient au total que de 33 milliards de dollars, dont 23 milliards pour l’Afrique subsaharienne, car ils ont la quote-part la plus faible au sein du FMI, explique Jean-Christ Ametepe, directeur du bureau d’Abidjan de la banque d’affaires SouthBridge. Au-delà de la notion de quote-part, ce qu’il faut comprendre, insiste le banquier, c’est que cette unité de mesure correspond, en réalité, à l’importance de chaque pays dans l’économie mondiale. Les pays à revenu élevé n’ont pas vraiment eu besoin des DTS pour faire face à la pandémie de Covid-19, car ils disposaient d’une flexibilité budgétaire et monétaire suffisante pour amortir l’impact de la crise, contrairement à 2008.
En tout cas, l’idée d’apporter un soutien financier massif au continent africain pour faire face aux conséquences de la pandémie de Covid-19 a fini par faire consensus au sein de la communauté internationale lors du G20 de juin 2021. L’objectif de départ est que les pays riches « flèchent » sur une base volontaire une part de leurs DTS en faveur des États qui en ont le plus besoin, notamment les pays d’Afrique subsaharienne.
Situation toujours tendue pour l’Afrique
Presque un an après cette annonce, non seulement l’Afrique ne s’est pas complètement relevée du choc de la crise sanitaire, mais les urgences s’accumulent avec la guerre en Ukraine, sans compter l’escalade de la crise climatique comme observée lors des récentes inondations en Afrique du Sud qui ont fait des centaines de morts. Sinon, les gouvernements tentent tant bien que mal d’apporter des réponses aux populations, mais ils doivent aussi faire face aux différents conflits armés, que ce soit au Sahel, au Mozambique, en République démocratique du Congo. Nombreux sont les États qui doivent débloquer rapidement des fonds pour répondre aux besoins humanitaires et résister aux autres menaces. Une situation qui pose avec plus d’acuité la nécessité d’un nouveau débat autour de la réaffectation des DTS, car, bien qu’actée sur le papier, sa concrétisation prend du temps et fait l’objet de plusieurs batailles en coulisses.
L’Afrique veut faire entendre sa voix
C’est le chef de l’État sénégalais Macky Sall, président en exercice de l’Union africaine (UA), à l’origine de cette réflexion dès novembre 2020, avec le président français Emmanuel Macron, qui porte au plus haut niveau et dans le débat public ce dossier très complexe. Il s’est exprimé à plusieurs reprises lors de grands rendez-vous internationaux et plus récemment à Dakar lors de sa rencontre avec les Young Leaders de la French-African Foundation, c’était le 5 mai. « Le débat, pour nous, à Paris, c’était de négocier avec les pays riches qui, eux, ont reçu le maximum de DTS alors qu’ils n’en ont pas besoin, parce qu’ils ont d’autres mécanismes qui leur permettent de contenir la crise », a expliqué le chef de l’État sénégalais. Si nous avions les mêmes mécanismes, nous les aurions mobilisés. Mais nous ne pouvons pas utiliser la planche à billets, nous ne pouvons pas nous endetter de façon inconsidérée. Résultat, la croissance qui était au-dessus de 6 % dans certains de nos pays a chuté parfois à 0 % et, pour relancer l’économie, nous avons besoin de la réallocation des droits de tirage spéciaux, des droits que les pays riches nous prêtent », a fait valoir Macky Sall. Le Sénégal a reçu 467 millions de dollars, soit 290,5 milliards de FCFA, un montant qu’il a jugé insuffisant